« Les Gouttes de Dieu », l’enivrant manga qui a bousculé le monde du vin


Elles ont ruisselé jusqu’à créer d’abondantes rivières. Les Gouttes de Dieu, bande dessinée japonaise imaginée par un frère et une sœur, il y a une vingtaine d’années, pour mettre en scène les vins qu’ils dégustaient, sont devenues une saga de quarante-quatre tomes au triomphe mondial. Et ont changé le destin de plusieurs domaines viticoles cités au fil des pages. Elles font aujourd’hui l’objet d’une adaptation télévisée sous la forme d’une minisérie française, proposée en vidéo à la demande sur Apple TV + à partir du 21 avril.

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L’œuvre est une véritable ode au jus de la treille. Voici, à titre d’exemple, comment un chevalier-montrachet, millésime 2000, de chez Michel Colin-Deléger, est décrit dans le tome 18 des Gouttes de Dieu : « Il y a dans ce vin une austérité qui ne laisse pas s’approcher ceux qui l’abordent imprudemment. Mais malgré… non, justement pour cela, nous ne pouvons pas nous empêcher d’éprouver des attentes incommensurables. Car au sommet nous attend forcément ce bonheur qui ne nous décevra jamais. Une émotion englobant tout, peur, désespoir, peine, et qui nous fait grimper vers la joie, nous y attend certainement. L’essence de ce vin est l’“épreuve”. Et ce que l’on ne peut goûter qu’en l’ayant surmontée, un immense sentiment d’accomplissement. »

Ce manga, publié en France entre 2008 et 2016 par Glénat, évoque quelque 700 vins au fil des 439 épisodes. Tous de manière imagée, poétique, plongeant le lecteur dans un univers spécifique pour chaque étiquette bue (dans le cas du chevalier-montrachet, l’ascension du mont Cervin sert à la description). La plupart des vins sont français, mais il y a aussi des cuvées italiennes, espagnoles, californiennes, australiennes ou japonaises. Le duo de scénaristes − qui signe sous le pseudonyme Tadashi Agi − a goûté tous les vins pour les traduire en mots, avant que la dessinatrice Shu Okimoto ne s’en empare.

Lyrisme assumé

Ainsi, une BD plutôt destinée à des lecteurs avertis est devenue en France un succès colossal, avec 1,4 million d’exemplaires vendus. Quinze millions écoulés dans le monde. Elle marque aussi un tournant. « Les Gouttes de Dieu ont ouvert la porte en France au seinen, le manga destiné à de jeunes adultes, explique Satoko Inaba, directrice éditoriale de Glénat Manga. Auparavant, ce genre littéraire était à tort associé à un public adolescent, avec des récits d’action, souvent violents. »

Aucun livre, surtout, n’avait osé aborder le vin avec un lyrisme autant assumé. « La fiction en France a tendance à se focaliser sur la trame scénaristique, alors que le manga se fonde sur les personnages et leurs émotions, partagées avec le lecteur, explique l’éditrice de Glénat. C’est donc un excellent support pour parler du vin. Et comme l’essence du manga est aussi de vulgariser pour toucher le public le plus large, on apprend énormément en lisant Les Gouttes de Dieu. Mais c’est dangereux, aussi, puisqu’on n’a qu’une envie après la lecture : aller boire du vin ! »

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